Télétravail : solution d’avenir ou boom éphémère ?

La crise du COVID-19 a amené 40 à 60 % des Belges à télétravailler. Jacques-François Thisse (professeur émérite d’économie à l’UCLouvain), Laurent Taskin (professeur en sciences de gestion à l’UCLouvain) et Isabelle Hansez (professeure de psychologie à l’ULiège) ont uni leurs approches pour analyser les aspects positifs et négatifs du tout au télétravail et, surtout, proposer des pistes pour l’avenir. Les résultats montrent que trop de télétravail diminue ses effets bénéfiques. Pour être efficace et épanoui, il faut aménager son espace et son temps de travail. Une régulation de la présence est indispensable pour préserver la cohésion et la créativité.

Depuis le début de la crise, près d’un Belge sur deux a pratiqué le télétravail, accélérant brutalement sa diffusion. La pratique du télétravail pourrait s’intensifier au point que l’on ne revienne pas à la situation « pré-covid ». Quelles barrières la crise a-t-elle fait sauter, quelles sont les conséquences de cette intensification du télétravail demain et quelles recommandations peuvent-elles être adressées aux employeurs, aux salariés et aux décideurs politiques ?

Dans un numéro spécial de Regards économiques, revue scientifique de l’Institut de recherche en sciences économiques et sociales de l’UCLouvain, trois experts dialoguent afin d’offrir une compréhension multidisciplinaire du « télétravail » aujourd’hui et demain.

D’un point de vue économique, la question-clé demeure celle de l’incidence d’une pratique intensive de télétravail à domicile sur la mobilité, sur les villes et sur l’économie dans son ensemble. Le gain espéré de productivité au travail sous-tend le développement du télétravail, souvent déclaré, mais rarement mesuré de façon précise. De rares études montrent néanmoins une relation de cause à effet entre la pratique du travail à domicile et un surcroît de productivité au travail.

Du point de vue des organisations et du management, la pratique du télétravail a conduit à revisiter les processus de régulation du rapport au travail (contrôle et autonomie au travail, styles de management, identité au travail, productivité et équilibre entre sphères privée et professionnelle). Un autre enjeu pour les entreprises est la gestion de la distance sur les comportements au travail. Selon le professeur Laurent Taskin, le futur verra s’intensifier le télétravail. L’enjeu organisationnel et managérial clé de l’après-covid sera donc de réinventer de nouvelles routines de travail autour de la présence, là où c’était la distance qui était régulée avant la crise.

Du point de vue des individus, les recherches sur le télétravail ont identifié des effets plutôt positifs en termes de satisfaction, de motivation, de bien-être ou de fidélisation. Une enquête, menée durant le premier confinement par la professeure Isabelle Hansez, offre une perspective nuancée des conditions de la pratique du télétravail durant le confinement et des perspectives affichées par les personnes sondées. Plus que jamais, la dimension du bien-être au travail semble cruciale dans la valorisation du télétravail par les individus et montre aussi les disparités de situations qui amènent à apprécier différemment la flexibilité offerte par le télétravail.

Infos : www.regards-economiques.be