Recherche contre le cancer : la molécule MitoQ prévient les récidives de cancer du sein chez l’animal
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Des scientifiques de l’UCLouvain sont parvenus à prévenir, dans des conditions se rapprochant de la pratique clinique, la récidive et la dissémination de métastases d’un cancer du sein humain, chez la souris, et ce grâce à la molécule MitoQ.
Même s’ils sont détectés de manière précoce, certains cancers sont plus agressifs et plus mortels que d’autres. C’est le cas, par exemple, d’une forme particulière de cancer du sein appelée « triple négatif » et qui représente 10 à 15 % de tous les cancers du sein. Le nom de ce type de cancer est lié au fait qu’il ne dépend ni des estrogènes, ni de la progestérone, ni du gène HER2, contrairement aux autres types de cancer du sein, ce qui limite les possibilités thérapeutiques. Le traitement de ces patientes, par chirurgie et chimiothérapie, ne permet pas toujours de prévenir le développement de récidives locales et de métastases. À l’heure actuelle, il n’existe aucun traitement spécifique capable d’empêcher ces deux événements.
Une recherche de longue haleine
En 2014, le professeur Pierre Sonveaux, chercheur à l’Institut de recherche expérimentale et clinique de l’UCLouvain (IREC), était parvenu à faire la démonstration qu’il était possible de prévenir l’apparition de métastases tumorales de mélanome chez la souris. Cependant, les molécules expérimentales utilisées à l’époque n’étaient pas utilisables en pratique clinique. Depuis 2016, le chercheur et son équipe ont poursuivi leurs travaux, grâce au soutien important et continu d’un mécène de la Fondation Louvain. Aujourd’hui, ils sont parvenus à identifier que le MitoQ permet d’éviter, dans 80% des cas, l’apparition de métastases et d’éviter, dans 75% des cas, la rechute locale d’un cancer du sein humain transplanté chez la souris. À l’inverse, la plupart des souris non traitées ont vu leur cancer récidiver et se généraliser. « Sans la Fondation Louvain et le soutien continu de notre mécène, qui souhaite garder l’anonymat, nous n’aurions pas pu recruter rapidement des chercheurs compétents, reconnaît le professeur Pierre Sonveaux. Notre succès d’aujourd’hui est aussi le sien ».
Pour ce faire, les chercheurs ont traité des souris, auxquelles des cellules de cancer du sein humain avaient été préalablement transplantées, comme on traite les patientes à l’hôpital, en combinant une intervention chirurgicale à de la chimiothérapie classique. Cependant, les chercheurs ont ajouté la nouvelle molécule, le MitoQ, à ce traitement. Ils ont non seulement démontré que l’administration de MitoQ est compatible avec les chimiothérapies classiques, mais aussi que ce traitement innovant empêche simultanément les rechutes et les métastases des cancers du sein chez la souris. « Parvenir à bloquer les métastases, on s’y attendait, s’enthousiasme Pierre Sonveaux. Par contre, éviter la récidive du cancer, c’était totalement inattendu. Quand on obtient ce genre de résultat, ça nous motive énormément pour la suite ».
La molécule MitoQ
Les cancers sont composés de deux types de cellules cancéreuses : celles qui prolifèrent et qui sont généralement sensibles aux traitements cliniques et d’autres, appelées cellules souches cancéreuses, qui sont souvent plus résistantes à la chimiothérapie et sont à l’origine des métastases. Si la chirurgie d’un cancer ne les élimine pas toutes, elles causent des récidives. Ces rechutes sont actuellement traitées par chimiothérapie, avec des degrés d’efficacité faibles, à cause de la résistance aux traitements développée par les cellules tumorales. C’est là que pourrait intervenir la molécule MitoQ, en empêchant le réveil des cellules souches cancéreuses.
Ces nouvelles observations ouvrent la voie à de futures études cliniques, destinées à démontrer l’efficacité du nouveau traitement chez les patientes cancéreuses. Il est cependant important de préciser que les résultats décrits ci-dessus ont été obtenus dans un modèle animal. L’extrapolation à la maladie humaine nécessite de passer par les différentes phases des protocoles de recherche clinique avant d’envisager l’utilisation de cette molécule chez des patients cancéreux.