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Détecter les mutations du VIH pour mieux le soigner

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8 March 2021, modified on 6 December 2024

Depuis plus de 15 ans, le Pr Benoît Kabamba-Mukadi, responsable du pôle de microbiologie médicale de l’Institut de recherche expérimentale et clinique et du laboratoire de référence SIDA de l’UCLouvain, mène des recherches sur le virus de l’immunodéficience humaine ou VIH. Dernièrement, l’UCLouvain a fait l’acquisition d’un équipement de pointe capable de mieux détecter les mutations du VIH. Une première en Belgique !

Aujourd’hui, le SIDA est une maladie chronique pour laquelle il existe des traitements efficaces. Toutefois, il n’est actuellement pas possible d’éradiquer complètement le VIH de l’organisme des patients contaminés. Afin de traiter la maladie, une trilogie de données est à prendre en compte : médicament, patient, virus. Les médicaments actuels (trithérapie) associent au moins deux molécules antivirales de classes différentes. Cependant, même s’ils sont opérants, leurs effets secondaires peuvent être sévères. Certaines interactions avec d’autres médicaments sont à éviter et des précautions particulières sont à prendre pour les femmes enceintes ou qui souhaitent l’être. Le traitement doit donc être adapté en fonction de ces paramètres. Quant aux virus, ils ne restent pas inactifs, certains mutent et deviennent résistants à ces médicaments. Afin d’aller plus loin dans ses recherches, le Pr Kabamba-Mukadi et son équipe ont bénéficié, en 2019, du legs de Madame Gallet dont la volonté était de soutenir la recherche contre le SIDA. En effet, jusqu’à présent aucune étude n’a évalué l’impact clinique des mutations de résistance au sein de l’ADN proviral sur l’activité potentielle des médicaments antirétroviraux.

Qualifier et quantifier les mutations de résistance du VIH

Grâce à la plateforme de séquençage à haut débit acquise par l’UCLouvain, les variants minoritaires à partir de 5 % pourront être détectés et quantifiés. Cette plateforme, première du genre en routine clinique en Belgique, permet de réaliser des séquençages à haut débit du génome viral. C’est-à-dire de déterminer l’ordre d’enchaînement des acides nucléiques de l’ARN du virus. Cet ordre permet de savoir si le virus a muté et donc s’il pourrait résister aux médicaments. La plateforme utilise une technologie plus performante qui offre de nombreux avantages. Auparavant seule la présence ou l’absence d’une mutation importante pouvait être repérée. Aujourd’hui, il est possible de qualifier et de quantifier les mutations de résistance, même les plus minoritaires. Cela permet aux chercheurs d’envoyer un rapport de résistance au clinicien qui in fine permet d’adapter au mieux la thérapie.

Des résultats prometteurs

Plusieurs objectifs ont pu aboutir grâce au soutien du legs Gallet. Les chercheurs ont pu déterminer l’efficacité de la plateforme de séquençage à haut débit. Sur base des 110 échantillons séquencés à ce jour, l’efficacité moyenne a été démontrée à hauteur de 80 %.

Sur les 64 échantillons de patients n’ayant reçu aucun traitement ou en suivi thérapeutique analysés, 14 d’entre eux ont montré au moins une mutation de résistance uniquement présente au niveau de l’ADN proviral. Des mutations qui sont donc absentes au niveau de l’ARN viral plasmatique. Sur base des premières analyses, aucune mutation en particulier ne semble être plus fréquente au niveau de l’ADN proviral. Néanmoins, la collecte d’échantillons doit se poursuivre à plus grande échelle.

Enfin, les chercheurs ont démontré l’utilité clinique de la détection des variants proviraux. De ce fait, des patients, dont la charge virale est indétectable pourraient bénéficier in fine d’une simplification thérapeutique.  « Les challenges sont encore nombreux, tel que l’analyse détaillée des variations génétiques des virus. Finalement, ces mutations dites “ archives ” pourraient potentiellement constituées un facteur de risque d’échec thérapeutique. Pour cela, un suivi à long terme de ces patients est indispensable dans le but de prévenir potentiellement l’apparition de variants », explique le Pr Kabamba-Mukadi.